visite de Mr. Didier Lopinot

 
 
Kežmarok
 
Remise de la médaille
 
En attendant le grand départ, nous avions à affronter d´autres événements, tout aussi importants, mais moins périlleux quand-même. En premier lieu, la remise de la distinction de l´Ordre national du Mérite, dont la République Française m´a fait l´honneur de me gratifier. Si je mentionne cet événement privé, c´est pour souligner tout d´abord que le mérite de la distinction revient aussi à tous ceux, qui autour de moi, sont dans la même démarche, et oeuvrent à ce que nous puissions continuer jusque là. Et aussi pour constater, que la cérémonie de la remise de la médaille, organisée par l´Ambassade de France en Slovaquie, avec un énorme retentissement médiatique, a eu des retombées positives sur la marche de notre association et sur nos activités.
 
Tout le volet pédagogique de notre action, notre lycée privé qui s´adresse en premier lieu aux étudiants roms originaires des colonies-bidonvilles de la région, contrairement à ce que l´on pourrait croire, rencontre beaucoup de contrariétés de la part des institutions, qui de par la définition du bien-fondé de leur existence, devraient oeuvrer au soutien d´activités telles que les nôtres, sont en réalité dans une démarche tout à fait contraire, elles nous mettent des bâtons dans les roues, pour parler simple. Ainsi, lors de la dernière réunion des conseillers pédagogiques de la région, nous avons été désignés par certains comme „la honte de l´enseignement slovaque“! Alors, que personne ne nous connaît en réalité, les collègues se sentent sans doute agressés dans leurs amour-propre, en nous voyant nous investir là, où tout le monde a échoué – l´enseignement en milieu rom. Et pourtant, nous sommes on ne peut plus discrets, il ne nous viendrait pas à l´idée de se venter ou prétendre apporter des solutions, car il n´y a pas de quoi se vanter, ni de solutions toutes trouvées, à part celle d´un investissement personnel démesuré. 
L´ambassadeur de France en Slovaquie, SE Mr. Didier Lopinot, en venant remettre la médaille de l´Ordre national du Mérite, directement chez nous, a signifié la reconnaissance de notre action au plus haut niveau, et les calomnies ont, pour du moins momentanément, cessées. En effet, lors de la cérémonie au château de Kežmarok, étaient présents les représentants officiels de la ville, quelques amis, parmi les quels nos chers Carrets, et une flopée de journalistes, puisque c´est l´ambassade de France qui organisait le tout. Alors l´information est passée a l´Agence de presse nationales, et tout à coup tous les médias étaient curieux de découvrir qui était ce fameux chevalier décoré par la France, que personne ne connaissait. Car c´était ca, avant tout, qui les intéressait et qu´ils n´arretaient pas de souligner – la France reconnait les mérites slovaques de quelqu´un que la Slovaquie n´a jamais songée a reconnaître.
Cela faisait un bout de temps que nous ne trouvions pas un moment opportun avec l´ambassade pour la remise de la médaille, alors lorsque la date du 29 mai fut proposée par le secrétariat de l´ambassade, nous avons tout de suite accepté. Mr Didier Lopinot, ambassadeur de France a fait le déplacement, nous nous sommes déjà rencontrés auparavant, heureusement, je savais que c´était un homme d´expérience et de sang froid, car la suite des événements allait mettre à l´épreuve ses qualités de diplomate chevronné. La tout devait commencer à 13h pile, à 12h30 je courais encore en vitesse m´acheter une chemise convenable pour ma veste de costume et le noeud papillon que je voulais inaugurer, je n´avais absolument pas le temps avant, car dés le matin j´avais à mes trousses 3 équipes de télé qui voulaient absolument filmer le tout, l´école, le bidonville, le ramassage des gosses, etc. Tout se passe très bien, je réussi à trouver une liquette convenable du premier coup, et je file à l´encontre de Mr. l´ambassadeur qui arrive avec une petite demi-heure d´avance. Tant mieux, comme ca je pourrais l´accompagner moi-même au château, en bavardant un peu sur le chemin. Nous arrivons dans la cour du château pile à 12h55, tout le monde est là, je suis sidéré par la foule des journalistes, il fait un froid de canard, on ne va pas s´attarder, on monte les escaliers pour accéder à la grande salle de réception du château. Les caméras tournent, les Kesaj chantent, j´ouvre la porte pour laisser entrer nos invités de marque. La porte est fermée. Vite un coup d´oeil aux alentours, personne du château à portée de main. Sourire, la caméra tourne, il fait froid, on ne va pas rester là une éternité. Heureusement, un journaliste de la première chaîne des infos a la bonne idée de faire une interview de l´ambassadeur, qui malgré le froid glacial répond avec un sourire chaleureux, et explique le comment et pour quoi de la médaille. Moi, frais chevalier frigorifié, j´essaie vainement de forcer le portail qui résiste comme au moyen-âge, je ne peux pas donner de coup de pied, toujours ces fichues caméras à tout filmer en direct, alors en souriant béatement dans les objectifs j´essaie de joindre la directrice du musée du château, qui m´explique, au bord de la crise cardiaque, que tout a été changé hier à la dernière minute, rien n´était prévu pour aujourd´hui, la salle n´est pas prête. Comme si rien n´était, avec mon sourire le plus enjoué dans la caméra et ma voix la plus furieuse dans le micro de mon portable, j´enjoins le gardien du château de m´ouvrir sur le champ, sinon je fais un malheur, il ne faut pas se fier à mon sourire, c´est pour la caméra, je sais être un monstre en privé. Le gardien, impressionné, cède devant mon sourire féroce et ma détermination non moins féroce, et le temps que Mr. Lopinot, ambassadeur de France, finisse son interview, nous pénétrons enfin dans les entrailles de ce château, qui a failli devenir pendant ces quelques minutes d´étérnité un château d´horreur, mais il n´en fut rien, et c´est dans une magnifique salle chauffée à point, que nous nous sommes en fin de compte retrouvés. Tout est bien qui finit bien, et là, il en fut de même, comme dans les contes de fées, car, vraiment cette distinction était tout ce qu´il y a de plus inattendu, et tous les Kesaj, présents dans la salle, se sont retrouvés intronisés chevaliers de la bonne conduite et du labeur pour la bonne renommée des siens, du moins c´est comme ca que je leur ai expliqué l´événement, et ils en étaient très fiers. S´en est suivie, à notre bonne habitude, une petite visite de l´école, avec démonstration Kesaj, musique, danse, balalaïka...