Raj´Ganawak

Journée Internationalle de l´Enfance, Saint Denis,1 juin, 20h30

Chez Camo, c´est du gâteau...  Oui, ça rime, et ça correspond tout à fait à la vérité. A chaque fois que nous passons et que nous nous produisons au chapiteau portant le nom impossible de Raj'ganawak (je n'en connais toujours pas la signification, à chaque fois j´oublie de demander...), tout se passe très bien. Il va sans dire, que c´est à la bonne franquette, au niveau de la logistique nous sommes loin des fastes des vestiaires de l´Olympia, mais cela n'a aucune importance, nous nous sentons vraiment comme chez nous, et ça fait du bien. En plus, c´est toujours plein d´une foule de spectateurs hétéroclites, dont Saint Denis a le secret, qui viennent en masse et nous sont totalement acquis. 
En fin d'après-midi, peu après notre retour de la Tour Eiffel, nous assistons à un atelier de danses et chants pour des enfants Doms, mené par Yarchel, un artiste syrien. Camo, fidèle à ses convictions, accueille dans son chapiteau  tout le monde. Tous ceux, qui à un moment donné, pour des raisons diverses, passent par Saint Denis, ont la porte ouverte au Chapiteau Raj´ganawak, donc autant dire, le monde entier. Le monde des réfugiés, migrants, apatrides... Aujourd´hui donc, ce sont des enfants Doms qui viennent pour leurs activités du mercredi. Ca tombe bien, nous sommes le 1 juin, la Journée Internationalle de l´Enfance. Les Doms, ce sont les Tsiganes, les Roms orientaux. Lors des vagues migratoires en provenance de la Syrie ces dernières années, les Doms ont rempli, eux aussi, le contingent des réfugiés de la misère, fuyant les affres de la guerre. Ils ne se prévalent pas de leur origine tsigane, mais en les voyant faire la manche aux nombreux feux rouges ou dans le métro, leur appartenance à l'ethnie tsigane était pour moi évidente, du moins fort probable... Et effectivement, après que des associations se sont investies auprès d´eux, cette appartenance à l´éthnie rom a été reconnue au grand jour. Il y a une bonne douzaine d ́ enfants, de 6 à 10 ans, filles et garçons, qui menés par Yarchel, nous font une démonstration de leurs chants et danses. 
Bien sûr, c'est très oriental. Et cela donne envie de participer, alors nous n'hésitons pas, et nous nous joignons à eux, et l´air de rien, en musique nous passons à nos chants et danses tsiganes d´Europe Centrale. Les petits Doms suivent, enchantés, sans le moindre problème ils se moulent dans notre répertoire. Et nous assistons, comme plus d´une fois, à ce petit miracle de la culture tsigane, qui réside dans le fait, que si des Roms se retrouvent par hasard, où que ce soit, bien que provenant de cultures très éloignées, comme c ́est le cas ici avec ces petit Doms, eh bien, à chaque fois il y a une cohésion, une communion, qui ne laissent aucun doute sur leur origine commune. Là, c´est un tout petit gamin, il devait avoir dans les 6 ans, qui n´a pas pu résister à nos rythmes, qu´il a certainement entendu pour la première fois de sa vie, et s´est joint spontanément à nous, avec ses pas de danse à lui, en faisant tourner dans sa main un espèce de chaplet, geste très typique pour les danses d´hommes d´Orient, mais ca collait parfaitement à nos musiques à nous. Cette expérience de culture tsigane transnationale, nous l´ avons déjà vécue maintes fois, lors de nos rencontres avec des gitans, manouches, des roms des Balkans, à chaque fois, malgré des apparences bien divergentes, la similitude au niveau culturel était évidente, et il en était de même cette fois-ci avec les petits Doms de Syrie. 
Vient l´heure du spectacle, le chapiteau se remplit, oui, il n'est pas très grand, mais ça fait du bien de voir une "salle comble“... Nous bénéficions même d'une sono, qui donne du baume au cœur à  nos chanteurs, fanas de micros, mais on se suffit à nous mêmes, nous sommes assez puissants même tels quels, en acoustique naturelle. Le spectacle dévale de nouveau, tel un tsunami sur les spectateurs, il n'y a pas où s´échapper, tout le monde est pris par l'énergie qui dévale de nos jeunes, une sorte de transe prend possession de tous ceux qui sont là,  Camo me dira ensuite que ça relève du chamanisme... Une belle apothéose pour cette tournée qui nous faisait un peu peur au début. Les nouveaux sont devenus des presque anciens, tant ils se sont moulés dans le moule du groupe, les anciens ont acquis le stade non seulement d´anciens au décompte des années dans le groupe, mais aussi au niveau de la responsabilité et de l´engagement qu´ils ont manifesté envers tout ce qui concernait le groupe, ils nous ont solidement épaulé, et tout cela a fait que cette tournée que nous craignions au départ, en fin de compte était, comme Camo, du gâteau...!